La sécurité affective des enfants de blessé d'abandon

Lorsque les symptômes de la blessure deviennent problématiques, le blessé d'abandon est parfois déjà parent lui-même d'un ou plusieurs enfants. Se pose alors, pour les parents, la question de la sécurité affective des enfants, et plus généralement de leur éducation, dans un cadre où la blessure favorise les dysfonctionnements comportementaux du parent blessé (surtout s'il est de type négatif-agressif), et par là même ceux de sa famille.

Une difficile et douloureuse priorisation

S'il est important pour le conjoint d'être compréhensif et indulgent vis à vis du blessé d'abandon, cette compréhension ne peut s'exprimer que dans un cadre où la santé des enfants est prioritairement préservée. Il s'agit là d'une limite essentielle à laquelle le conjoint doit veiller, même si le choix à faire est parfois difficile et le prix à payer conséquent, dans une situation de crise du blessé d'abandon.

Autant l'écrire tout de suite, l'équation à résoudre est complexe, et aucune solution n'est véritablement satisfaisante. Les variables de cette équation sont si nombreuses que nous avons plutôt affaire à du cas par cas :

• L'acceptation (le refus) du blessé d'abandon d'un accompagnement par un spécialiste ;
• La (l'in)capacité du conjoint à "gérer" les comportements excessifs devant les enfants ;
• La (l'in)capacité du conjoint à verbaliser et clarifier le raisonnable auprès des enfants ;
  
• La profondeur de la blessure d'abandon, et l'intensité de la crise ;
  
• L'unité du couple (favorisant parfois la répétition des symptômes problématiques) ;
• La séparation du couple (blessure d'abandon potentielle chez les enfants) ;
• ...
  

Je crois pouvoir dire qu'actuellement aucun spécialiste n'est capable de prédire si des enfants peuvent véritablement être sécurisés affectivement (ou non) dans un tel contexte, et qu'il s'agit donc d'une préoccupation permanente du conjoint de blessé d'abandon.

Incertitude sur la transmission générationnelle

K.E. et K. Grossmann reprennent un certain nombre d'études sur la transmission générationnelle de la sécurité affective et montrent qu'il s'agit d'une incertitude (1), certaines tendant vers la transmission et d'autres pas.

D'autres études plus récentes sur le sujet tendent vers la transmission générationnelle de la sécurité affective. Ainsi D. Benoît et S. Goldberg (2) écrivent : "la classification d'attachement de la mère recueillie au cours de la grossesse prédisait avec succès la classification de son bébé à l'âge d'un an dans 82 % des cas. En analysant trois générations, 65 % des trios grand-mère/mère/bébé ont démontré des classifications correspondantes pour les trois générations."

B.S. Miles explique également très bien pourquoi cette transmission a lieu sur la base des modèles de la théorie de l'attachement (3).

Les recommandations sur le sujet

Au regard de la complexité de la question, et des incertitudes sur le sujet, le conjoint du blessé d'abandon peut donc s'en tenir aux recommandations définies sur le sujet (4) :

• Etre attentif : apprendre à reconnaître les signaux de détresse de l'enfant ;
• Etre réceptif : faire savoir à l'enfant qu'on est conscient de sa détresse, et réagir de façon appropriée ;
  
• Etre constant : le fait de réagir de façon constante et prévisible au besoin de réconfort de l'enfant crée chez lui un sentiment de sécurité ;
  
• Etre tolérant : accepter sans juger ou rejeter la détresse mentale ou l'inconfort mental de l'enfant ;
• Réconforter l'enfant : l'apaiser et le réconforter lorsqu'il éprouve de la détresse.

La question du cadre préservant au mieux la sécurité affective des enfants pourra ainsi être tranchée au regard de la capacité des parents à respecter ces recommandations simples et concrètes au quotidien.

(1) Développement de l'attachement et adaptation psychologique du berceau au tombeau de K.E. et K. Grossmann ; (2) L'attachement tout au long de la vie de S. Goldberg et D. Benoît ; (3) Votre influence sur l'attachement de votre enfant de B.S. Miles ; (4) Le fournisseur de soins et les influences de l'enfant sur l'attachement de S. Goldberg et D. Benoît