Exemple d'agressivité réactionnelle

Les exemples d'agressivité réactionnelle donnés ci-dessous sont des cas concrets vécus avec un blessé d'abandon de type négatif-agressif. Ils ont pour unique objectif d'illustrer des symptômes de cette blessure. Rappelons en préambule que :

1. La première personne à souffrir de la blessure est le blessé d'abandon, première victime, même si les apparences pourraient laisser penser que ses proches sont les principales victimes : ce sont (seulement) les secondes sur la liste ;
2. L'agressivité exprimée dans ces exemples semble tournée vers le proche à qui le blessé d'abandon s'adresse. Le comprendre ainsi est une erreur : il s'agit bien d'une agressivité réactionnelle, c'est à dire en réaction inconsciente à la blessure d'abandon. Contrairement aux apparences conscientes dans lesquelles même le blessé d'abandon se laisse piéger, cette agressivité ne vise pas l'interlocuteur de manière personnelle. Certaines attaques très personnelles, ou ciblant l'identité de l'interlocuteur, peuvent rendre cette compréhension dans les faits très difficile.
   
3. Il pourrait très bien arriver que des personnes non blessées puissent avoir les propos des exemples donnés ci-dessous : c'est bien dans le caractère excessif, intempestif, stéréotypé et répétitif (1) du comportement du blessé d'abandon qu'on peut identifier sa blessure. La seule observation de ces exemples chez un sujet ne permettent donc pas de diagnostiquer une blessure, et encore moins de remplacer un spécialiste, seul à même de faire une quelconque diagnostic valable.

Ces rappels énoncés, voici quelques exemples.

Premier exemple

Aujourd'hui je demande à mon conjoint blessé d'abandon l'heure de démarrage d'une activité concernant les enfants, et dont je sais qu'il se préoccupe. La réponse est immédiate et péremptoire :

"Je ne suis pas ta secrétaire !"

Au delà de la maladresse péjorative pour les personnes exerçant cette activité non moins valorisante qu'une autre (et auprès desquels je m'excuse humblement de la retranscrire telle quelle), cette réponse me semble être un concentré de plusieurs signes de l'agressivité réactionnelle du blessé d'abandon type négatif-agressif :

1. Sa non-valorisation, l'amenant à présenter sa situation d'une manière péjorative,
2. Son interprétation négative des pensées de son conjoint, qu'il accuse implicitement de manque de respect (et donc d'amour),
3. La forme du reproche, cohérent avec l'agressivité du blessé d'abandon de type négatif-agressif et destiné à mettre à l'épreuve (pour faire la preuve de l'amour).

Deuxième exemple

Dans une période de crise, mon conjoint blessé d'abandon saute des repas, ou même ne mange pas de la journée. Au mieux il grignote entre les repas lorsque la faim le tiraille un peu trop. Personne n'est au courant de son intention de manger ou pas (pas même lui souvent), son couvert est mis sur la table et sa place reste vide durant tout le temps du repas. Je mange donc avec les enfants. Un jour mon conjoint me dit :

"J'en ai marre que tu laisses mon assiette propre toujours sur la table ! Débarrasse là ! Les enfants s'inquiètent en la voyant et ils stressent déjà suffisamment comme ça pour ne pas en rajouter ! Et comme d'habitude tu ne t'excuses même pas !"

Ce propos rassemble également un grand nombre de signes de l'agressivité réactionnelle du blessé d'abandon type négatif-agressif :

1. Il me rend responsable (et elle victime) de la présence de son assiette sur la table (alors même qu'il a parfois lui-même mis le couvert),
2. Il montre son interprétation négative du fait qu'elle ne soit pas débarrassée,
3. Interprétation basée sur l'angoisse de percevoir l'insécurité des enfants devant cette situation (et les nombreux autres symptômes comportementaux du blessé d'abandon),
4. La perception d'inquiétude chez les enfants n'entraîne à aucun moment chez lui le doute sur son propre comportement et sur ma pleine responsabilité,
5. Il contient l'exigence d'une action impérative de ma part sur la question, dans la droite ligne du besoin de contrôle du blessé d'abandon,
6. Il sous-entend que ses intentions soient devinées sans qu'il ait besoin de les exprimer (de ne pas manger ou de gérer son assiette d'une certaine façon),
7. Il inclut la généralisation ("comme d'habitude") sur une partie du problème,
8. Enfin, il implique la mise à l'épreuve de la demande de pardon (pour faire la preuve de l'amour).

(1) voir la définition du complexe dans Les complexes personnels de R. Mucchielli